mardi 15 juin 2010

coté cocotiers






mardi 8 juin 2010

coin de nature



jeudi 20 mai 2010

pajérama

un court-métrage d'animation brésilien où un jeune indien est pris dans un tourbillon d'expériences étranges, mystères d'espace-temps, voyage et projections dans d'autres mondes.

pajérama de Leonardo Cadaval - 2008/ Glaz entretenimento, 9 minutes, muet.
(Vous pouvez aussi le visionner ici en meilleure qualité)




mercredi 19 mai 2010

où l'on (re)découvre que le XVIème siècle n'est pas si lointain

Un petit texte re-découvert il y a peu, extrait de l'Histoire d'un voyage fait en la terre du Brésil, de Jean de Léry.

Jean de Léry passe presque un an accueilli dans une communauté Tupinambá en 1557, suite au désastre d'une tentative d'implantation d'une colonie française sur la côte brésilienne. En 1578, il publie un livre décrivant son voyage, ses découvertes, sa vie chez les Tupinambá (Toüoupinambaoults).

Et au milieu de tout cela, une conversation avec un vieil indigène que je ne me lasse pas de relire.


" Au reste, parce que nos Toüoupinambaoults sont fort ébahis de voir les Français et autres des pays lointains prendre tant de peine d’aller quérir leur Arabotan, c’est-à-dire, bois de Brésil, il y eut une fois un vieillard d’entre eux, qui sur cela me fit telle demande :

"Que veut dire que vous autres Mairs et Peros, c’est-à-dire Français et Portugais, veniez de si loin quérir du bois pour vous chauffer ? n’en y a-t-il point en votre pays ?"

A quoi lui ayant répondu que oui, et en grande quantité, mais non pas de telles sortes que les leurs, ni même du bois de Brésil, lequel nous ne brûlions pas comme il pensait, mais (comme eux-mêmes en usaient pour rougir leurs cordons de coton, plumages et autres choses) les nôtres l’emmenaient pour faire de la teinture, il me répliqua soudain :

"Voire, mais vous en faut-il tant ?"
- Oui, lui dis-je, car (en lui faisant trouver bon) y ayant tel marchand en notre pays qui a plus de frises et de draps rouges, voire même (m’accommodant toujours à lui parler des choses qui lui étaient connues) de couteaux, ciseaux, miroirs et autres marchandises que vous n’avez jamais vues par deçà, un tel seul achètera tout le bois de Brésil dont plusieurs navires s’en retournent chargés de ton pays.
- Ha, ha, dit mon sauvage, tu me contes merveilles."

Puis ayant bien retenu ce que je lui venais de dire, m’interrogeant plus outre dit, "Mais cet homme tant riche dont tu me parles, ne meurt-il point ?
- Si fait, si fait, lui dis-je, aussi bien que les autres."

Sur quoi, comme ils sont aussi grands discoureurs, et poursuivent fort bien un propos jusqu’au bout, il me demanda derechef,
"Et quand donc il est mort, à qui est tout le bien qu’il laisse ?
- A ses enfants, s’il en a, et à défaut d’iceux à ses frères, sœurs, ou plus prochains parents.

- Vraiment, dit lors mon vieillard (lequel comme vous jugerez n’était nullement lourdaud) à cette heure connais-je que vous autres Mairs, c’est-à-dire Français, êtes de grands fols : car vous faut-il tant travailler à passer la mer, sur laquelle (comme vous nous dites étant arrivés par-deçà) vous endurez tant de maux, pour amasser des richesses ou à vos enfants ou à ceux qui survivent après vous ? La terre qui vous a nourris n’est-elle pas aussi suffisante pour les nourrir ? Nous avons (ajouta-t-il) des parents et des enfants, lesquels, comme tu vois, nous aimons et chérissons ; mais parce que nous nous assurons qu’après notre mort la terre qui nous a nourri les nourrira, sans nous en soucier plus avant nous nous reposons sur cela."

Voilà sommairement et au vrai le discours que j’ai oui de la propre bouche d’un pauvre sauvage américain. Partant outre que cette nation, que nous estimons barbare, se moque de bonne grâce de ceux qui au danger de leur vie passent la mer pour aller quérir du bois de Brésil afin de s’enrichir, encore y a-t-il que quelque aveugle qu’elle soit, attribuant plus à nature et à la fertilité de la terre que nous ne faisons à la puissance et à la providence de Dieu, elle se lèvera au jugement contre les rapineurs, portant le titre de Chrétiens, desquels la terre de par-deçà est aussi remplie, que leur pays en est vide, quant à ses naturels habitants. Par quoi suivant ce que j’ai dit ailleurs, que les Toüoupinambaoults haïssent mortellement les avaricieux, plût à Dieu qu’à fin qu’ils servissent déjà de démons et de furies pour tourmenter nos gouffres insatiables, qui n’ayant jamais assez ne font ici que sucer le sang et la moelle des autres, il fussent tous confinés parmi eux. Il fallait qu’à notre grande honte, et pour justifier nos sauvages du peu de soin qu’ils ont des choses de ce monde, je fisse cette digression en leur faveur."


On ajoutera pour le contexte que les Portugais, et en général les Européens ont tant exploité le bois-brésil, que l'arbre a quasiment disparu au XIXème. On m'a raconté que ce serait parce qu'il s'en trouvait quelques uns subsistant dans des zones encore reculées que l'on a pu en replanter et que l'espèce subsiste aujourd'hui. En règle générale, conséquence de la surexploitation du bois et de la déforestation concomitante, il ne reste aujourd'hui que l'équivalent de 3% de la mata atlântica (forêt atlantique) telle qu'elle existait le long du littoral brésilien et vers l'intérieur des terres vers 1500. Et aujourd'hui, en Amazonie et ailleurs, ça continue (quasi) comme en (15)40.

Mais ça c'est somme toute anecdotique. On ne parle pas ici 'seulement' de couper ou non des arbres, de détruire ou non des forêts, mais de la relation d'une société au monde. Le décalage entre ces deux visions du monde persiste lui aussi, quasiment en l'état. C'est une discussion que j'ai eue il y a quelques mois, justement avec une Tupinambá, et je m'en suis souvenue en relisant ce texte. On parlait de l'insertion de l'homme ou d'une société humaine dans le monde, des temporalités radicalement différentes entre les sociétés indigènes (peut-être les sociétés traditionnelles) et la société occidentale, des liens à la terre, de la conception qu'on en a, de la "terre"...

lundi 17 mai 2010

photos de village




dimanche 16 mai 2010

Tupinambá dans le colimateur

Depuis deux mois, la police fédérale brésilienne fait pression sur la communauté indigène Tupinambá de la Serra do Padeiro, une des communautés qui composent le peuple Tupinambá de Olivença, dans le Sud de Bahia.

Arrestation illégale
Le 10 mars 2010, la police fédérale s'infiltre en pleine nuit dans un village et arrête le cacique Babau dans sa maison, sans présenter aucun mandat, sans parler à personne. Il a fallu à la famille et à la communauté attendre plusieurs jours pour être contactés par les organes officiels et se faire confirmer la détention du cacique. Son frère Gil a été arrêté également, alors qu'il travaillait dans la ville voisine (Buerarema). D'abord détenus à Ilhéus, à 2 heures de leur famille, ils ont été transférés à Salvador puis dans une prison de haute sécurité dans le Rio Grande do Norte, à plusieurs centaines de kilomètres sous le prétexte que les autorités craignaient des débordements voire une évasion lors de manifestations de soutien prévues à l'occasion de la "Journée nationale de l'indien" le 19 mars. Le cacique est détenu depuis plus de deux mois sans jugement et le dossier d'inculpation n'aurait pour l'instant pas de preuves à l'appui des différentes accusations pesant sur Babau et Gil.

Plus de précisions dans ce bon article : http://fr.globalvoicesonline.org/2010/05/05/34388/

Pressions et abus
Depuis, la communauté subit des visites régulières et pas franchement amicales de la police fédérale dans les villages, dans les bus scolaires, sur les lieux de passage et de travail des membres de la communauté. Quinze mandats d'arrêt auraient été émis contre d'autres membres de la communauté, visant plus particulièrement les différents coordinateurs et leaders de la communauté. Les objectifs de ces actions sont stratégiques et pas très obscurs : criminalisation de la lutte des indigènes et des mouvements pour la terre, intimidation et tentative de paralysation de la communauté qui ne peut plus travailler dans de bonnes conditions, affaiblissement voire "cassage" de la communauté et de sa lutte.

Campagne anti-indienne
Tout ceci s'appuie en parallèle sur la campagne de dénigrement, de diffamation et de mensonges développées depuis plusieurs mois par les politiques et grands exploitants de la région, et dans la presse régionale et nationale. Les indiens de la région sont dans ces papiers montrés comme violents, vindicatifs, criminels, voleurs de terres, envahisseurs, assassins à l'occasion... Ils ne sont d'ailleurs pas indiens, on le dit et le répète, ce sont des "faux-indiens", "soi-disant indiens", "terroristes", qui profiterait de la faiblesse et du romantisme pro-indigènes pour revendiquer une identité qui n'existerait plus dans la région afin de se garantir des bénéfices indus (terre, santé, aides publiques, etc) sur le dos des vrais travailleurs. Avec cette campagne, les grands exploitants qui ne souhaitent à aucun prix devoir céder leurs terres réussissent à gagner à leur cause les habitants de la ville voisine, en tout cas à se garantir un climat favorable.

* traduction du titre du journal : Des "indiens" Tupinambá tuent, volent, pillent et provoquent la guerre dans la région.


méthodes inquiétantes
Au-delà des abus de la police fédérale, les rumeurs concernant d'autres méthodes inquiètent la communauté : têtes mises à prix, engagement ou en tout cas encouragement au recours aux pistoleiros (tueurs à gages, porte-flingues...)

Pourquoi
Depuis plusieurs années, la communauté Tupinambá de Olivença revendique son identité et son droit à la terre. En 2009, la FUNAI (fondation nationale de l'indien, organe gouvernemental) a reconnu ce droit, et défini un territoire de 47 000 hectares comme territoire indigène. Les tensions se sont alors exacerbées entre indigènes et exploitants/propriétaires. Le territoire n'est pas encore reconnu légalement, et les différentes communautés qui composent les Tupinambá d'Olivença se trouvent face à l'hostilité des grands propriétaires et des politiques qui leur sont favorables.

Dans le cas particulier de la communauté de la Serra do Padeiro, (environ 130 familles) les indigènes dérangent d'autant plus qu'ils luttent de manière tout à fait impressionnante : 21 zones de retomadas (occupation de terres) sont aujourd'hui occupées par cette seule communauté. Glicélia, soeur de Babau, explique que ces retomadas sont faites sur des zones abandonnées des terres des grands exploitants, aires laissées en friche depuis des années, ou sur des aires menacées par l'exploitation illégale du bois (coupes illégales, déforestation). Les terres occupées sont également habitées, nettoyées, valorisées, cultivées. La communauté produit de quoi vivre, se nourrir et vendre. Les écoles sur son territoire accueillent aussi bien des enfants Tupinambá que les enfants des petits agriculteurs non-indigènes, de même que les projets sociaux que la communauté met en place incluent généralement les familles de petits producteurs voisins.

Ce que j'en ai vu
Cette semaine, quand nous sommes allés rendre visite aux Tupinambá de la Serra do Padeiro, j'ai vu une communauté organisée, productive, accueillante. Bien vivante et la tête haute. "Ils disent que "Babau fait ceci, Babau fait cela", mais en réalité, Babau, c'est nous tous. Babau c'est la communauté. Nous tous nous luttons et nous travaillons." Les parcelles cultivées le sont pour la plupart sur un mode communautaire. La "maison de la farine" permet de produire une quantité impressionnante de farine de manioc, mais la production est à l'arrêt depuis deux mois, par peur des incursions policières. Les communications sont rendues difficiles par le manque de couverture réseau pour le téléphone et internet et la difficulté à se rendre en ville pour cause du climat hostile et des mandats d'arrêt. Et dans ces conditions, il est difficile pour la communauté de faire entendre sa propre voix.

Une voix qui en a à dire. Sur le pourquoi de la lutte pour la terre, sur sa vision du monde, sur ce que c'est que résister, pourquoi... Dangereuse, quoi.






détournement - le mac-osaure



















Ludique, pédagogique, récup'pratique, un peu antique... Vous ne pourrez pas ne pas tomber sous le charme !